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Tizi ouzou

Tizi-Ouzou porte et capitale de la Grande Kabylie

Lorsqu'il ne tonnait pas sur le Belloua !

Dans notre précédent numéro, nous avons évoqué Tizi-Ouzou, son douar accroché aux nants du Belloua et son ancien fort turc, le bordj. Situé au cœur de la Grande Kabylie, cet humble village va prendre son essor. Après l'affrontement avec les Français, les Kabyles considèrent que sans perdre leur âme, leur personnalité, sans abandonner leur langue, le " tamerzight " ou " tamazirt ", ils peuvent désormais travailler leurs terres, cultiver leurs figuiers et leurs oliviers. Commence alors, pour le pays Kabyle, une période de relations fructueuses, avec les commerçants et artisans installés entre bordj et douar.

Un rapport du 16 mai 1872 de la commission du centre propose l'aménagement de plusieurs sources situées sur le Belloua, susceptible de fournir un débit de 86 litres à la minute. Ce débit permettrait la construction d'une nouvelle fontaine sur la place. L'alimentation en eau serait alors suffisante. Il signale aussi la sécheresse de cette année qui influence le débit de l'unique fontaine du village. Les puits sont taris. " Et l'on peut être certain que si une année semblable se reproduit, lorsque les nouveaux colons seront fixés à Tizi-Ouzou, la pénurie d'eau sera complète, elle produira alors un véritable désastre ".Afin de prévenir les effets de cette pénurie d'eau potable, un projet d'alimentation est présenté par M. Thiebaud. Il propose d'installer une pompe à vapeur qui refoulerait l'eau de l'oued Sébaou à Tizi-Ouzou. Cela en dépit d'une dénivellation estimée à 80 mètres au-dessus du niveau de la rivière. Cette station d'élévation des eaux sera construite ultérieurement. L'alimentation en eau, sera ainsi assurée à partir des sources du Belloua, complétées par les apports de l'oued Aïssi et du Sebaou. Dans son rapport sur la période du 18 au 25 juillet 1873, le chef de bataillon Ed. Juiniay, signale que l'installation des colons est toujours subordonnée à l'envoi d'un plan du village, mettant fin à une situation précaire, et que les colons alsaciens et lorrains demeurés français, sont toujours dans l'attente de voir commencer les travaux de construction pour leur installation à Bou-Khalfa.

Entre le douar Belloua et le bordj, subsiste un vaste espace en pente relativement peu accentuée. C'est à partir de cette zone d'échanges entre deux versants de vallée, située sous le fort que vont se déployer les grandes artères de Tizi-Ouzou. Dans cette ville administrative et commerciale au confluent des deux Kabylies, l'une ancestrale, profondément ancrée dans ses traditions et l'autre ouverte, dynamique, résolument tournée vers l'avenir, s'installent, fonctionnaires, militaires, artisans, mais aussi des médecins, avocats,etc.

Mettant à profit ce potentiel de locataires solvables, des familles kabyles avisées font construire de petites maisons le long de ces avenues et notamment sur la partie haute du boulevard Beau prêtre et dans la rue principale qui deviendra plus tard la rue Ferdinand Aillaud.

Ainsi les familles Belhadj Hamoutène et bien d'autres, construisent de petites maisons en pisé, la pierre de taille, trop chère est réservée aux édifices publics, Mairie, Justice de paix, Banque. Ces maisons basses à simple rez-de-chaussée, comportent déjà 3 ou 4 pièces distribuées autour d'un couloir. Dans la partie arrière, une buanderie, un petit poulailler, un jardinet.

Dès son origine, Tizi-Ouzou, qui n'est encore qu'un village s'articule autour de deux vastes places, elles-mêmes séparées par la grande rue, future avenue Ferdinand Aillaud. En arrivant par la route de la gare et de Mirabeau, le voyageur trouve la place de la mairie et de la poste, bordée par l'hôtel Lagarde avec sa terrasse, hôtel qui deviendra plus tard celui de M. Koller. Dans le centre, en contrebas de l'église Saint-Eustache, une autre place, sur laquelle se retrouvent les gens du village et où se déroulent les concerts et les grandes fêtes. La grande place est, elle aussi, traversée par la route de Tamda et d'Azazga vers Bougie.

Face au bordj, le douar s'agrippe au flanc du djebel Belloua (695 mètres) qu'il recouvre jusau'à mi-hauteur, sur un peu plus de quatorze hectares. Les hommes travaillent à Tizi et le soir remontent avec les achats faits au marché ou en ville. Les tuileries briqueteries, huileries et ateliers de triage des figues occupent une importante main-d'œuvre. Au douar, les femmes élèvent de la volaille,confectionnent des objets de vannerie sur lesquels il est aisé de découvrir dans les coloris et les dessins un art typiquement kabyle.

Dans les champs environnants, quelques fellahs, en période de semailles enfouissent des grains d'orge avec une araire tirée par un mulet et un âne. Fin mai, début juin, on retrouve ces mêmes animaux, tournant sans arrêt sur des aires de dépiquage. Tableau d'un autre âge: des femmes soulevant à la fourche de bois, la paille et les glumes, que le vent sépare du grain.

Dans les années vingt le promeneur accédait au djebel Belloua par un petit sentier serpentant entre les champs avant de s'enfoncer dans une forêt de chênes-liège.

Le soir par temps calme, des fumées bleutées traînaient sur les toits de tuiles. Dans les ruelles des enfants poussaient un vieux pneu ou un cercle de futaille, cerceau improvisé, ou dévalaient en chevauchant une carriole faite de planches montées sur roulements à billes.

Le douar Belloua était administré par les notables de la " djemaâ " dont le président était en 1901, M. El Hadj Madhiou avec la qualité de caïd. Lors de l'investiture de M. Madhiou, le jeudi 6 février 1901, le Dr Huchard maire, lui remettait solennellement en présence de M. Tournier, administrateur et de nombreux conseillers municipaux, un burnous rouge frangé d'or.

Le douar ne cessera de se développer. En 1948, il abritait 2 300 familles comprenant 10 105 personnes.

La fontaine des orangers

Après le douar et le cimetière, à travers les arbres et les rochers, le sentier débouchait sur la maison du garde forestier. L'incessant gargouillis de l'eau coulant dans un bassin de pierre, annonce une fontaine délicieusement fraîche. La " fontaine des orangers " domine la vallée du Sebaou dont les eaux coulent 500 mètres plus bas, sous la route en corniche, mince ruban, qui suit les méandres de l'oued avant de le franchir sur le pont de Bougie. En automne les fleurs de cyclamen jaillissaient sous les touffes de fougère. Gorgés d'eau et de soleil, les orangers au printemps, embaumaient ce balcon sur le Sébaou, d'où montaient l'écho d'un appel en kabyle, le braiment d'un âne ou le klaxon d'une voiture signalant prudemment sa progression dans les virages de la route étroite et sinueuse construite en surplomb, de l'oued.

Un haut lieu de Tizi-Ouzou

Dès 1858 et avant l'arrivée du chemin de fer, des diligences tirées par quatre ou six chevaux, suivant les étapes à parcourir, assuraient les relations entre Alger et Tizi-Ouzou. Au cours du trajet, en passant par l'Alma, Ménerville, Bordj-Ménaïel, des " fondouk " assuraient aux passagers des pataches gîte, couvert et aux chevaux litière et picotin d'avoine après une harassante étape da ns le froid, la neige ou sous le sirocco. A Tizi-Ouzou, en 1887, M. Joseph Tuduri ouvre à l'entrée du village l'hôtel des postes, situé maison Laune et Carbonel dans la Grande Rue. Le 3 février 1888, M. Joseph Lagarde devient propriétaire de l'hôtel des postes, dont l'activité sera très profondément modifiée par l'arrivée de la voie ferrée. L'hôtel Lagarde deviendra le centre de l'activité économique, politique et mondaine de la sous-préfecture avec toutes les réunions électorales, les conférences ainsi que des concerts. Après M. Féiix Lagarde, c'est M. Joseph Lagarde fils qui, le 1er juillet 1905, prend la succession de son frère. Par la suite l'établissement sera plus connu sous le nom d'hôtel Koller.

Le chemin de fer arrive à Tizi-Ouzou

A partir de 1877 le réseau des Chemins de Fer Algëriens de l'État, prolonge vers l'est le tronçon Alger-Maison-Carrée. Ce tronçon long de 10,300 Km sera mis en voie double à compter de 1893. En 1881, cette ligne à voie normale reliera Maison-Carrée à l'Alma et à Ménerville (43 km) pour être par la suite en 1886, prolongée de 52 km jusqu'à Tizi-Ouzou.En 1887 et en l'étude de Me Pareux, notaire à Alger, la société des Chemins de Fer de l'État achète à M. Boyer André et à Mme née Marie-Rose Viola une parcelle de 2 ha 69 ares 13 ca pour y construire la future gare de Tizi-Ouzou. Le mardi 13 mars 1888, à 17 heures, un premier train d'essai arrive en gare de Tizi-Ouzou, après un trajet relativement rapide. La mise en service définitive est cependant retardée par un glissement de terrain dans la traversée de Bou-Khalfa. Une grève des ouvriers employés sur la " variante ", (déviation) de BouKhalfa, retarde encore l'inauguration

Enfin, le dimanche 10 juin 1888, se déroule la grande fête d'inauguration de la gare: discours des autorités, avec banquet, mat de cocagne, jeu de la poêle, repas des aveugles, jeux de ciseaux pour les demoiselles, jeux du baquet, des pots cassés, courses en sac.

La gare, située à 1800 mètres de la localité, sur la route départementale de Mirabeau à Ménerville est voisine du marché du samedi. Elle devient vite un but de promenade dominicale.

En 1937, après la construction de la nouvelle gare, les trains de voyageurs arrivent en ville à proximité immédiate de la mairie et des grandes artères du centre ville.

Avec l'affectation aux forces alliées en 1942 des locaux d'enseignement, les enfants suivent les cours dans cette nouvelle gare jusqu'en 1945, où le batiment est réaffecté à la S.N.C.F.A. pour ses services de voyageurs.

Tizi-Ouzou, est aussi un important centre de pénétration. Une route ombragée franchit le pont de Bougie, remonte vers le nord-est, le cours du Sébaou jusqu'à Tamgout pour desservir les villages de Tamda, Mékla et de Fréha. Vers le sud-est, la route relie Tizi-Ouzou à Fort-National et Béni-Mansour.

A partir de Tizi-Ouzou des services de diligences et, par la suite, des autobus de marque Berliet, puis Saurer, exécutent les liaisons avec les Ouadhias, Boghni, Azazga et Michelet. En 1902, l'entreprise de M. Pierre Provenzano, assure à 13 heures et à 23 heures un service de Tizi à Fort-National. Vers 1910, Ies petits autobus de la société Passicos, plus rapides, conduisent au retrait définitif des vieilles pataches.

Vers la fin des années trente, les cars de la Compagnie Amar assurent la liaison routière Alger-Tizi-Ouzou par Ménerville, Bordj-Ménaïel. Plus tard cette ligne passera sous le controle des Messageries de la Grande-Kabylie.

Ces robustes véhicules voyagent toujours à pleine charge, le toit encombré de sacs, petits meubles, colis divers et animaux, chèvres ou moutons entravés, notamment les jours de marché. Les liaisons Tizi-Ouzou-Azazga sont assurées par les gros autobus de marque Saurer de l'entreprise Vaucelle. Stationnement au départ d'Alger sur le bastion central, départs à 13 h - 17 h et 17 h 30. La vie à Tizi était alors rythmée par les arrivées et les départs de ces services auxquels il convient d'ajouter ceux de l'entreprise Deschanel.

La poste en pays kabyle

 

 



20/08/2006
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